Propositions à gogo

J'aime l'humour, j'aime rire. J'aime ce qui est susceptible de provoquer le rire. J'aime l'humour de qualité supérieure, l'humour surchoix, l'humour d'excellence. Alors, j'espérais trouver une belle occasion de rigoler en acceptant de faire un site Internet pour un candidat aux élections municipales prochaines se réclamant de l'esprit des salopards du parti présidentiel. Je ne suis pas déçu.
Le site est en place. Il reste quelques bricoles à fignoler mais je considère que ma part de travail est terminée dans les grandes lignes. A présent, il est question de le remplir. Ce n'est pas moi qui vais dérouler l'argumentaire, rédiger le programme, dire les ambitions ou dévoiler les idées. Ce serait amusant que l'on me laisse le soin de le faire à mon idée mais ce serait aussi dangereux. Pour l'instant, les quelques zones dévolues aux textes sont remplies de "lorem ipsum" et cela ne dit pas grand chose du programme politique de l'équipe de candidat·e·s. Soyons honnête, toutefois, une idée est là pour annoncer ce programme, une belle déclaration d'intention comme on en rêve souvent. Elle tient en une phrase d'une beauté époustouflante, ciselée avec amour par un amoureux des lettres, par un littéraire exigeant féru de poésie : « Soixante propositions pour la commune, ensemble nous réussirons mieux ! ». N'est-ce pas beau ?
Or, un problème arrive et vient enrayer le fonctionnement de cette belle machine. N'avons-nous pas été trop ambitieux en avançant l'hypothèse que nous pourrions trouver soixante idées d'un coup ? C'est que les idées, ça ne se trouve pas aussi simplement que l'on peut le penser. J'en connais qui en cherchent au moins une depuis des années sans parvenir à mettre la main dessus.
Un coup de fil. « Est-ce qu'il est possible de changer le titre et écrire "quarante idées" ? », me demande l'interlocuteur. Dissimulant le fou rire que je sens prêt à éclater, je le rassure et lui propose même, arguant du fait que ces élections se dérouleront en 2020, de proposer vingt idées. Je sens la tête de liste réfléchir un instant à la suggestion, il n'a pas entendu la moquerie, l'ironie. Il hésite et déclare que ce n'est pas sot. Il me faut redoubler d'efforts pour ne pas rire trop fort.


A cet instant, je lui conseille de faire une liste de toutes ces propositions et de les classer par ordre d'importance. Je l'encourage à me faire part des toutes premières d'entre-elles. Il n'hésite pas un instant : le patrimoine, l'embellissement de la commune, du lien entre les concitoyens… Ça s'arrête là. Ça n'a pas beaucoup avancé depuis la dernière fois. Ce n'est pas gagné. Pas d'inquiétude, les propositions arriveront au fil du temps ! C'est là l'idée forte ! Oui ! La voilà ! On va faire appel aux concitoyens pour apporter les propositions ! On va organiser des réunions publiques et on mettra en place une consultation citoyenne !
Une autre question. « Peut-on enlever le texte de la page d'accueil ? ». On peut le faire, oui. Le futur élu (il n'en doute pas un instant puisqu'il est soutenu par un sénateur du département, octogénaire et transfuge du PS passé à LREM) me raconte qu'après avoir beaucoup réfléchi, il ne faut pas assommer l'électeur sous trop de texte et préférer des formules chocs bien senties. Bon. Le problème, c'est que ces formules, il faut les trouver. Là, comme ça, elles ne lui viennent pas à l'esprit, à monsieur le futur maire. Il va les chercher. Ok. C'est pas gagné.

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