L'écono musée du Moulin de la Rouzique

Le moulin de la RouziqueHier, en compagnie de ma mère et de l'un de mes frères, je suis allé faire une promenade du côté des moulins de Couze, non loin de Lalinde, dans le Périgord Pourpre. Nous avons visité l'exposition de photographies de Bernard Dupuy sur le thème du papier et des papeteries de Couze et avons visité l'écono musée du Moulin de la Rouzique. C'est de ce moulin que je vais vous parler aujourd'hui.

A la fin du 19e siècle, ce sont treize moulins qui se suivent le long de la Couze. Les villages de Couze et Saint-Front sont le berceau de l'industrie papetière française dès le début du 15e siècle. Aujourd'hui, trois papeteries demeurent et l'une d'elles est devenue un écono-musée que l'on peut visiter pour apprendre la magie de la fabrication du papier. En raison du débit régulier et constant de la Couze et de la qualité exceptionnelle de son eau au Ph neutre (de l'ordre de 7), on a vite compris que le site était idéal pour produire du papier. La visite du musée est l'occasion de comprendre cette histoire du papier et les conditions dans lesquelles les habitants du cru travaillaient.

l'écono musée du moulin de la Rouzique

Le moulin de la Rouzique

A l'époque, il n'était question que de papier chiffon. Ce sont les chiffonniers qui approvisionnaient les moulins en matières premières. Tissus de lin et de chanvre, mais aussi matières organiques que l'on utilisait pour "coller" le papier[1]. Ces tissus étaient confiés aux mains d'une équipe de femmes qui avaient pour tâche de les découper en petits morceaux[2] à l'aide d'une lame de faux fichée dans une sorte de banc. La petite histoire relate que ce travail était dur et malsain. Les tissus étaient sales et il est attesté qu'une ouvrière aurait attrapé la peste dans les années 1930. Les travailleuses étaient payées au poids de pétassous produits.

tissu

petassou

Dans les premiers temps, ces bouts de tissu étaient écrasés dans des piles à maillets avant l'arrivée des piles hollandaises. La technique est la même dans les deux cas. Il s'agit d'écraser le tissu pour obtenir la fibre qui constituera la pâte à papier. Pour entraîner ces piles, il fallait de l'énergie. L'eau permet d'entraîner la roue à aubes du moulin et tous les mécanismes mécaniques ou les pompes. A Couze, les roues sont dites "en dessous". Cela signifie que l'entraînement ne se fait pas par une chute d'eau qui arriverait sur le haut de la roue mais par le courant provoqué par un canal rétréci à la base de ladite roue. De ce fait, les roues des moulins de Couze sont étroites.

roue en dessous

mecanismes et pompes

Les fibres végétales tirées du tissu étaient lavées dans des sortes de grandes lessiveuses avec de la soude ou du chlore. Cette grande lessive était là encore réservée aux femmes et on dit que celles qui étaient affectées à ce travail préféraient revenir à la découpe des tissus tant le contact avec les eaux de lavage était difficile à supporter.

Ce sont les hommes qui prenaient le relai pour confectionner la pâte à papier. Ils s'occupaient de faire fonctionner les piles et à façonner les feuilles de papier. Longtemps, tout le papier était produit en feuilles sur des formes vergées et filigranées de tailles différentes.

fabrication d'une feuille à la forme

Une fois la feuille réalisée, elle était déposée sur un feutre puis couverte par un autre feutre et ainsi de suite jusqu'à obtenir un empilement de 101 feutres et 100 feuilles. Cet empilage était alors placé sous une énorme presse pour extraire le maximum d'eau.

presse en bois

On séparait alors les feuilles de papier des feutres et on confiait à des ouvrières le soin d'aller les faire sécher sur des cordes de chanvre dans les séchoirs[3] surplombant le moulin. Ces séchoirs sont munis de panneaux (les interlats) qui permettent de contrôler l'aération et la lumière du soleil et de la lune capables de blanchir ou jaunir le papier[4]. Pour étendre les papiers sur les centaines de mètres de corde, les ouvrières utilisaient des bancs d'étendage et des ferlets, sortes de T en bois qui permettent de lever la feuille jusqu'à la corde. Le papier restait là durant quelques jours pour sécher.

séchage du papier

Les papiers de la Rouzique

L'ultime étape consiste à faire repasser les feuilles de papier sous la presse pour l'aplanir. Ensuite, il y a l'étape du tri et on peut lisser le papier selon la finition que l'on souhaite obtenir.
La visite du musée permet de voir une collection de vieux papiers, les plus anciens datant de la fin du 16e siècle.

Collection de papiers anciens

L'écono-musée de la Rouzique a un site Internet www.moulin-de-la-rouzique.com où l'on peut en apprendre bien plus sur son histoire, sur l'histoire du papier, sur la fabrication du papier, sur les horaires d'ouverture et tout plein d'autres choses.

Notes

[1] Le collage, obtenu autrefois par ajout de colle animale (colle de poisson ou gélatine animale) permet de rendre le papier imperméable. Sans collage, nous obtenons du papier buvard.

[2] les pétassous

[3] Les étendoirs

[4] On fabriquait des papiers blancs que l'on voulait blancs mais aussi des papiers de couleurs. Il fallait éviter que l'effet de la lumière vienne colorer ou décolorer la production.

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