Si seulement j'avais été un mignon garçon catholique

Les récentes affaires de pédophilie au sein de l'église catholique romaine française de chez nous m'amènent à me poser la question de ce qu'aurait été ma vie sexuelle si seulement j'avais eu la chance d'être éduqué dans l'amour du Christ ressuscité par un prêtre aimant. Je vous rassure, je ne suis pas issu d'une famille athée voire, horreur !, communiste ! Non, non. Je suis bien le rejeton de lignées de croyants et de bons croyants. D'authentiques catholiques bien sous tous rapports. Si du côté de mon père j'ai une grand-mère qui n'est pas loin de la grenouille de bénitier, du côté de ma mère le croyance en l'être divin était plus discrète. Mon arrière grand-mère, d'origine polonaise, croyait, me semble-t-il, d'une façon proche de la superstition. D'ailleurs, superstitieuse, elle l'était, persuadée que cela portait malheur d'ouvrir un parapluie à l'intérieur d'une maison ou de poser le pain à l'envers sur une table. Elle avait pas mal de bondieuseries chez elle, un Christ en plâtre, un flacon d'eau bénite de Lourdes, une icône de la vierge noire de Częstochowa. Elle avait ressenti une joie immense et une fierté certaine lors de l'élection du pape Jean-Paul II Karol Józef Wojtyła. Cependant, jamais elle ne m'a emmerdé avec la question de dieu, jamais elle ne m'a poussé à apprendre le Notre Père, jamais elle ne m'a traîné à l'église où elle n'allait d'ailleurs pas. A l'église, par contre, j'y allais les fois où mes parents me laissaient chez mes grands-parents paternels. La messe, c'était le samedi soir à Cergy. Je m'y ennuyais sincèrement. Avant de dormir, ma grand-mère tentait de me faire réciter ce Notre Père qui n'est jamais rentré dans mon crâne. Déjà, il me semble que je m'étais fait mon idée sur l'importance de la religion. A la réflexion, c'est assez bizarre. Qu'est-ce qui fait qu'un petit garçon accepte ou n'accepte pas l'idée de dieu ? Qu'est-ce qui peut bien le conduire soit à se laisser porter par cette notion culturelle ou pas ? Je suppose que l'éducation y est pour beaucoup. Dans le même temps, je ne peux pas totalement écarter la possibilité que l'on puisse être touché par la grâce divine et que, du coup, on ne puisse faire autrement que croire. C'est la révélation et on ne peut rien contre cela. C'est du moins ce que certaines personnes m'ont affirmé. Elles ont reçu la foi et ce n'est pas explicable.
Ma mère, mon père, je n'ai jamais bien su s'ils croyaient ou pas. Mes parents ont été baptisés, ils ont fait leur communion, se sont mariés à l'église mais je ne suis pas sûr du tout que ça puisse signifier quoi que ce soit. Malgré son éducation, malgré sa mère bigote, mon père ne savait rien de la religion catholique. Je pense qu'il avait fait le ménage dans sa tête. Je n'ai jamais eu le sentiment que la question de l'existence d'un dieu perturbait mon père. Quant à ma mère, si elle ne croit peut-être pas réellement à ce dieu promis, elle croit aux forces de l'esprit, ce qui la rapproche de Mitterrand. Elle espère une continuité de cet esprit après la mort. Pour mes frères, il me semble qu'à part l'aîné il n'y a que du mécréant. Pour ma part, après une période "agnostique" (mais j'aimais bien le mot qui faisait cultivé) puis "athée", j'en suis à "ne me concerne pas". Je veux dire que je considère que la position de l'athéisme est encore trop préoccupée par dieu pour moi.

Bon. Lorsque j'étais petit, avant ma dizaine, alors qu'il était plus ou moins question que mon grand-frère prépare sa communion, ma mère m'envoyait au catéchisme avec lui. Sans doute pour avoir la paix. On m'a souvent dit que j'étais du genre pénible, étant petit[1]. Et alors, nous allions à la chapelle des Louvrais, à Pontoise. Le seul souvenir de ces séances, c'est une chaussure en caoutchouc, peut-être une base de botte de chantier ? A l'époque, le quartier des Louvrais était encore en plein chantier. C'était un quartier qui avait poussé là, dans les champs et qui préfigurait l'arrivée prochaine de la ville nouvelle de Cergy-Pontoise. En revenant du catéchisme, nous traversions un terrain vague et mon frère avait trouvé cette chaussure qu'il avait passée par dessus l'une de ses chaussures. Il faisait le clown et je rigolais. Que nous avait raconté le curé ou la personne qui s'occupait de notre éducation religieuse ? Aucune idée.
Et puis, une voisine s'est chargée de faire le catéchisme. Il suffisait de traverser la rue et nous y étions. J'accompagnais toujours mon grand-frère. Nous étions plusieurs enfants du quartier et la voisine nous racontait des trucs et nous faisait faire des exercices. Moi, ce qui m'intéressait, c'était les gâteaux. Et j'ai un souvenir de cette période. On nous avait donné des crayons, des feutres, des feuilles de papier et on nous avait demandé de dessiner notre vision de la vie. Obéissant, j'ai dessiné quelque chose comme un bébé ou un enfant à gauche, un homme au centre et une tombe à droite. Je me suis fait engueuler et je n'ai toujours pas compris aujourd'hui. Pour vous dire que ça m'a marqué, je n'ai pas oublié. On ne m'a jamais dit ce qui n'allait pas dans ma vision du problème mais ça continue à me tracasser. Qu'attendait-on que je dessine ? Ça a été sans doute la première et dernière fois que j'ai eu un doute quant à question religieuse.
Mes parents ont abandonné l'idée de faire faire sa communion à mon grand-frère. Mes deux petits frères n'ont pas été baptisés et dieu n'a plus jamais été à l'ordre du jour à la maison. Bon débarras. De fait, je n'ai pas souvenir de la présence d'un crucifix chez nous et si l'on fêtait Pâques et Noël, c'était pour faire plaisir à ma grand-mère et d'une façon très laïque. Noël, c'était les cadeaux, Pâques des œufs et des poissons en chocolat. Je n'y voyais pas le lien avec la religion chrétienne. Aujourd'hui, mes connaissances théologiques sont bien minces. Je connais le nom de Jésus, je sais quelques bricoles de sa vie retracée par quelque évangile, vaguement. Je connais Marie et Joseph, Moïse et les tables de la Loi mais je mélange tout. En fait, tout simplement, je m'en fous, ça ne m'intéresse pas.

Ceci n'est pas une inflation
Et régulièrement, une affaire de pédophilie au sein de l'église catholique et romaine éclate. Je ne peux pas m'empêcher de penser que des parents ont poussé des enfants à aller aux devants de curés. Ce n'est pas un crime[2] de croire en dieu. Je veux bien comprendre que la force de l'éducation et de la culture fasse que l'on croit sincèrement en un dieu et que l'on veuille éduquer ses enfants dans cette croyance. Disons plutôt que je veux bien l'entendre plutôt que le comprendre. Mais j'imagine tout de même qu'un enfant victime d'actes de pédophilie ne doit pas ne pas laisser transparaître son malaise ou ses souffrances. Alors oui, évidemment, il ne doit pas être facile de comprendre et d'imaginer et il ne faut pas généraliser. Tous les hommes d'église ne sont pas coupables. D'accord. Et peut-être, d'après ce que j'ai pu lire et entendre, l'enfant victime se sent-il avant tout coupable. Le prêtre représente l'autorité et une autorité supérieure à celle des parents, comme l'instituteur ou le professeur dans l'Education nationale[3]. Je ne veux pas dire que les parents sont coupables de confier leurs enfants à des pervers pédophiles. Par contre, et dans le cas qui occupe les journalistes actuellement, nous sommes vraisemblablement en présence d'un prêtre pédophile repéré par ses supérieurs hiérarchiques, hiérarchie qui n'a pas agi pour faire cesser ces agissements ou, du moins, pour éloigner les enfants ou interdire à ce prêtre de les approcher.
Ce ne doit pas être si simple. Parce que je n'ai pas été confronté à ce problème, que je ne connais presque personne qui ait été victime d'actes pédophiles, je ne peux pas savoir ce que la victime peut ressentir et comment elle peut vivre avec cela. Je suppose qu'il ne doit pas être simple et qu'il n'est sans doute pas souhaitable de porter la suspicion sur tous les hommes qui travaillent au contact des enfants. Je ne sais même pas quelle peine la société doit ou peut faire supporter aux pédophiles. La vie en société implique les risques de rencontrer un jour soit un pédophile soit un assassin, soit un psychopathe, soit je ne sais quoi d'autre. Les cas d'abus sexuels sont majoritairement commis dans l'enceinte du milieu familial, ai-je entendu dire. A mon avis, il convient d'éduquer les enfants à dire. Ce ne doit pas être simple mais ce doit être faisable. On enseigne aux enfants de ne pas accepter des bonbons de tout le monde, de ne pas suivre n'importe qui dans la rue, de se méfier des vieux bonhommes qui puent et qui sont nus sous leur grand imperméable. Apprenons-leur à se méfier des curés, des instituteurs, des moniteurs de centre aéré ou de colonie de vacance. Dans le fond, il faudrait tout simplement interdire aux enfants de s'approcher des adultes et vice-versa. On pourrait aussi, tenant compte de ce qu'ils sont censés en faire, rendre obligatoire l'ablation des couilles aux hommes d'église.

Notes

[1] Je ne suis pas certain que ça ait vraiment changé mais je vous assure que je me mets nettement moins en colère depuis que je suis vieux.

[2] sinon contre l'intelligence

[3] ou les cas de pédophilie existent également

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