Tentative de feuilleton collaboratif du mardi (38)

Le feuilleton est en pleine plongée. Il s'enfonce, il coule, il sombre. Pour autant, il n'est pas terminé et c'est Liaan qui nous propose une suite qu'il qualifie, lui aussi, de transition.

À bord du Nautilus

L'annonce de Lafleur provoque la stupeur générale dans le carré du sous-marin. Rendez vous compte : Lafleur annonce que nous allons au plus profond des mers, aux confins du centre de la Terre ! Seul Gérard, éternel crétin, s'enthousiasme devant la perspective de faire un beau voyage aux abysses, de pouvoir admirer la faune et la flore comme s'il s'agissait de faire un tour de manège au Carrousel des Mondes Marins à Nantes (Loire Inférieure, à cette époque).

— Mais, tu ne vois pas que c'est un voyage vers la mort que nous prépare Lafleur ? lui demande Colette, blanche d'angoisse.

Et l'on voit le Doktor Gemenle qui observe les différents cadrans, et montre d'un doigt tremblant l'altimètre dont l'aiguille tourne de plus en plus vite. Et lorsque son doigt se dirige vers le cadran du déconomètre à dépression, le Doktor Gemenle s'écrie :

— Lafleur ! Ne faites pas de pêtises, le déconomètre va sur la zone rouche !

Lafleur se tourne vers le Doktor Gemenle et dit, calmement :

— Herr Toktore ! Malgré toute l'estime que j'ai pour vous, je suis au regret de vous dire : Zut ! Zut aussi à vous tous, avec vos regards chafoins. Vous n'êtes tous que des immondes et putrides larves, dont je sature de voir vos piètres images, faits et gestes ! Vous ne méritez plus de vivre sur cette planète. Colette a raison, c'est un voyage vers la seule chose qui compte pour moi, désormais : le monde du silence, le monde du rien... Mais comme le disait Nietzche "sans la musique, la vie serait une erreur !"

Et Lafleur de soulever un panneau situé sous les cadrans qui tournent de plus en plus vite, les spectateurs découvrent un clavier.

— L'orgue du Nautilus ! croit bon de dire Roland.

Après s'être fait craquer les doigts, Lafleur se met à jouer "Au clair de la Lune" au piano ! Car en fait de la puissance attendue de grandes orgues, les auditeurs n'ont droit qu'à la modeste musique d'un piano jouet, des marteaux ne frappant que des tiges de métal...

— Ce type est complètement fou ! Déclare Tante Etzelle qui quitte son siège pour rejoindre Gaëlle qui, comme les autres, est complètement tétanisée. Seul, le Brigadier Chapraut déclare :

— C'est un illuminé ! Le Royaume des Cieux leur appartient ! J'ai soif, où qu'est-y la réserve de calvados ? En disant cela, il se lève et s'éloigne dans le couloir, à l'arrière du sous-marin, et ouvre toutes les portes qui se présentent.

Lafleur joue toujours, comme absent, et est passé à "Frère Jacques". D'un commun accord avec le Doktor Gemenle, Östäl et Maurice s'approchent de Lafleur, et pendant que Östäl ceinture de ses puissants bras Lafleur, Maurice appelle Alice :

— Vous êtes infirmière ?

— Oui, mais…

— Dans l'armoire sur votre gauche se trouve une pharmacie, trouvez nous un calmant pour ce pauvre Lafleur !

Lafleur essaie de se sortir de l'étreinte vigoureuse d'Östäl, mais la poigne du géant rend vaine toute tentative.

Alice trouve un dérivé de morphine et après avoir remonté la manche du bras droit de Lafleur, le garrotte et lui injecte une bonne dose. Le produit fait son effet très rapidement et c'est un Lafleur, apaisé, qui s'endort dans les bras d'Östäl.

— Nous voici dans le même bateau, enfin, je voulais dire dans le même bain, déclare Maurice, Lafleur est devenu fou, serait-ce le jus de moule qui s'avère toxique ? Il voulait nous faire, tous, mourir !

Le Brigadier Chapraut revient à ce moment dans le carré, et demande au Brigadier Chapraud :

— Dites-moi, Brigadier Chapraud, une atteinte aux bonnes mœurs est-elle possible en ce lieu ?

— Ma foi, Brigadier Chapraut, nous sommes qui comme qui dirait dans un lieu privé qui reçoit du public, nous en sommes la preuve vivante et sensée, enfin, je le présume... Qu'avez vous à me signaler ?

— Brigadier Chapraud, si nous sommes dans un lieu privé, recevant du public, nous avons à signaler une affaire de mœurs : une atteinte caractéristique à la pudeur !

Le Brigadier Chapraud reste avec les deux yeux en ronds de flan. Tout le monde s'était retourné vers les deux brigadiers.

— Venez voir, Brigadier Chapraud, vous allez pouvoir constater de visu, dit le Brigadier Chapraut, et juger de vous-même.

Curieux de voir cela, le Brigadier Chapraud suivit son collègue dans le couloir, et à la troisième porte que ce dernier ouvre, d'un geste auguste, le Brigadier Chapraut montre une scène au Brigadier Chapraud.

— Ah ça, pour un attentat à la pudeur, c'est un attentat à la pudeur !

À peine dit cela, Gérard qui voit aussi la scène, revient en rigolant et en criant presque :

— Un seau d'eau ! Vite !

Et se tourne vers Colette et lui annonce :

— Il y a que je suis pas le seul cocu de l'histoire, Femme !

Colette s'empresse de venir regarder ce qui se passe dans cette pièce de la troisième porte, non sans avoir giflé généreusement Gérard, ce qui ne l'empêche pas de continuer à rigoler :

— Cocue, la Colette, cocue ! Et pas par moi !

La scène dans la pièce était assez explicite : Frédéric, qui avait jusqu'ici, été très discret, au point que l'on le crut disparu, Frédéric, l'amant de Colette, pantalon encore aux chevilles ouvrait de grand yeux en regardant tout à tour les gendarmes (en civil, modèle 1890). Frédéric était resté accouplé avec Uma, qui le retenait de ses belles, longues, fuselées mais fermes jambes.

— Pris la main dans le pot de confiture, mon salaud ! dit Colette et gifle violemment Frédéric.

— M'est avis qu'il est resté "collé" avec l'humanoïde femelle, constate le Brigadier Chapraut.

— S'accoupler avec un robot, c'est bien un queutard, ce Frédéric, dit sobrement le Brigadier Chapraud.

Désintéressés de la scène cocasse, les autres occupant du Nautilus étaient sur un problème plus préoccupant : le sous-marin s'enfonçait vers les profondeurs abyssales, les aiguilles de l'altimètre tournaient de plus en plus vite, les indications du cadran étaient en pieds, mais qu'elle soient en pieds ou en mètres, le Nautilus s'enfonçait de plus en plus. Déjà, la structure du navire commence à craquer.

Le Nautilus est-il perdu et nos amis avec ? Frédéric réussira-t-il à s'extraire d'Uma ? Le Brigadier Chapraut trouverat-t-il sa bouteille de calva ? Nos lecteurs supporteront-ils ce feuilleton encore longtemps ? Prochainement, le numéro 39.

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