Lorsque j'étais petit, il me semblait qu'il était bien moins grave d'être blessé que mort. Dans les jeux d'enfant, dans les films, celui qui n'était que blessé se relevait et pouvait continuer la bataille épique, repartir à l'assaut du méchant. Il avait reçu une douzaine de balles dans le corps ou une flèche d'indien en plein cœur mais il rebondissait formidablement non sans afficher une fugace grimace due à la douleur qui, toutefois, était bien présente, la gueuse. N'écoutant que son courage, le héros revenait à la vie et poursuivait sa mission, faisant à la fin triompher le bien sur le mal. Le méchant périssait et c'était bien.
Aujourd'hui, j'ai conscience que la mort est parfois préférable à la blessure. Ainsi, j'ai récemment été témoin d'une grave blessure qui, semble-t-il était diablement douloureuse. Il s'agissait d'une blessure engendrée par le ridicule, le sentiment, l'impression, d'avoir été ridicule. On prétend que le ridicule ne tue plus depuis longtemps mais, sans doute plus grave, il continue à blesser. Il se trouve que le blessé, conscient de n'avoir pas été tué fatalement, a encore trouvé assez de force vitale pour regimber d'importance. Il exigea que l'on appelât Police Secours, que l'on hélât le SAMU, que l'on convoquât les hommes de médecine, que l'on lui réservât une place au bloc opératoire. Il fut écouté, on soigna sa blessure d'orgueil. Il s'en remit.
Hélas, la blessure laissait des cicatrices, des stigmates indélébiles. Notre homme avait été blessé jusqu'au plus profond de son âme et, aux yeux de ses quasi semblables, il n'avait plus cette aura si merveilleuse. Il avait montré sa faiblesse, ce n'était plus un dieu, juste un simple mortel. Il dû descendre de son piédestal pour s'abaisser à affronter le vulgaire à hauteur d'yeux. Ce n'était pas un piédestal bien haut mais pourtant la chute fut douloureuse. L'orgueil avait peut-être été pansé, l'image n'en était pas moins flétrie.
Le ridicule dont avait été lâchement frappé ce grand homme aurait pu être assumé. Il aurait dû l'être. Personne n'aurait douté du caractère parfaitement volontaire de ce petit ridicule qui serait passé pour une belle preuve de relativisme, de distanciation par rapport à son ego. La grande masse des petites gens aurait su saluer comme il le faut cette grandeur d'âme et cette capacité à savoir se moquer de soi. Il est amusant de constater combien, souvent, il suffit d'être le premier à rire de soi pour que l'on vous encense en retour, d'ailleurs. On sera bien plus enclin à prêter une foule de qualités diverses à celui qui saura manier l'auto-dérision qu'à celui qui se montrera bouffi de prétention, de sérieux, de vanité et d'amour de sa petite personne.
Et cela me fait penser à tout autre chose
En 2014, un homme connu des Périgourdins, bien implanté dans le tissu associatif de Périgueux, engagé dans diverses actions caritatives, humanitaires ou solidaires, s'apprête à s'en remettre au suffrage en annonçant sa candidature aux élections municipales de Périgueux. Homme de gauche, il se présente sous l'étiquette du Front de Gauche. Un jour de marché, menant campagne, cet homme laisse ses pas le conduire en un estaminet de la ville. Là se trouve un ancien premier édile du nom de Yves Guéna, homme de droite de surcroît. Les deux hommes se connaissent et il arrive ce qui devait arriver, ces deux hommes que tout devrait séparer se laissent aller à se causer et à se retrouver à l'occasion de la dégustation d'une boisson apéritive. Ô drame ! On crie à la trahison, l'affaire remonte jusqu'aux oreilles de Jean-Luc Mélenchon qui retire son investiture au candidat. La faute est impardonnable, colossale, irrévocable. On comprend sans peine le courroux de M. Mélenchon et on le trouve même bien conciliant de n'avoir pas exigé que l'on traîne le traitre impénitent au pilori en place publique pour qu'il puisse expier sous les lazzi de la foule des gens de gauche. Lorsque l'on est de gauche, la moindre des choses est de ne pas boire en compagnie d'un homme de droite. Tout le monde sait ça. C'est même l'un des fondamentaux de l'apprentissage de la vie politique. Staline a-t-il jamais bu avec Hitler ? Marchais a-t-il jamais bu avec Pompidou ? Non ! Bien sûr que non ! Et Mélenchon lui-même, a-t-il jamais eu la faiblesse de consommer un verre d'alcool avec un ennemi du peuple ? Non, parce que Jean-Luc Mélenchon est un homme de convictions qui ne transige pas avec l'idéologie et parce qu'il est des choses avec lesquelles il convient de ne pas rigoler. Non mais ! Gloire soit rendue à Jean-Luc Mélenchon et que la grâce divine dégouline sur ses épaules saintes.
Cet homme coupable, c'est Maurice Melliet. J'avoue ne pas le connaître bien mais ceci depuis longtemps, depuis les années 80 quand il avait son agence de publicité Persona Grata. Je soupçonne en lui un de ces dangereux anarchistes puisqu'en plus de boire des coups avec l'ennemi il se pique de poésie au sein du club des Hydropathes de Périgueux. C'est dire le caractère néfaste du personnage !
Maurice Melliet n'entra pas dans une colère remontée face au dieu vivant du Front de Gauche de l'époque. Il se contenta, et c'est là que l'on comprend mieux la couardise de l'homme, d'envoyer un poème à M. Mélenchon. L'histoire ne dit pas si le Grand Homme a lu les vers et leur a répondu. L'histoire ne dit pas non plus de quel côté le ridicule a frappé, du reste.
1 De Tournesol - 05/04/2018, 14:54
Des détails,des détails !Le ridicule ne tue que les baudruches et les vaniteux,comme vous le remarquez si bien.Envous lisant,je pensais à cette phrase de Nietzsche: « Vengeance,le désir de vengeance ne vient pas du fait qu’une injustice a été commise et doit être réparée,mais du fait que j’ai été humilié et que je dois par tous les moyens rétablir mon autorité. »
Les gens qui se croient importants me dépriment.
2 De Tournesol - 05/04/2018, 14:57
Pendant longtemps j’ai cru qu’on ne pouvait pas être con et de gauche.Ayyyyyyy!
Qui dit qu’il n’a plus d’illusions a encore celle là.
3 De arielle - 05/04/2018, 15:21
Joli portrait !
Le con lambda borné de gauche à l'esprit aussi étroit qu'un chas d'aiguille, ça fait mal parce que l'on ne s'y attend pas du tout.
En parlant d'aiguille, il n'est pas facile de suivre le fil de la vôtre :-)
Nous ne sommes pas toujours ridicules de notre fait, il arrive que d'autres se débrouillent pour vous rendre ridicules ou honteux là où vous, vous n'avez vu dans cette situation aucune malice. Ça m'est arrivé lorsque j'étais enfant...
4 De Tournesol - 05/04/2018, 15:32
@arielle : coucou! Il y a deux types d’humiliation: l’une est haissable car c’est la moquerie d’un puissant sur un faible ( ou d’un sachant sur un naïf)
L’autre est celle d’un orgueilleux pris à son propre piège,où mis à mal dans sa vanité ,et elle peut être réjouissante.
Les blessures causées dans le premier cas peuvent être douloureuses fort longtemps.
5 De arielle - 05/04/2018, 15:49
@Tournesol : Oui, je suis d'accord avec vous. Mais il y a des subtilités. Dans mon cas, oui, j'étais naïve par rapport aux autres enfants mais il s'agissait d'éducation, de contexte religieux de mon point de vue. Que voulez-vous à 6 ans je ne voyais pas où était le mal eux oui. Alors me mettre au défi de baisser le pantalon de pyjama du petit Nicolas je ne voyais pas bien pourquoi je ne l'aurai pas fait hein. Tous ces petits vicieux de cathos ont rigolé, Nicolas a pleuré et moi j'ai pris une bonne fessée. Pffff. J'ai bien sûr survécu plus athée que jamais. Rires. Nous mettre en pension chez les cathos, mes parents n'étaient plus à un paradoxe près. Bref c'étaient des "sachants" mais pas pour moi qui n'avait pas reçu la même éducation...
6 De Tournesol - 05/04/2018, 16:10
@arielle : ouah! Vous avez connu le petit Nicolas?
7 De Sax/Cat à Montpellier - 05/04/2018, 16:16
@Tournesol :
Celui qui a été président ?
8 De Tournesol - 05/04/2018, 16:20
Et après il a fait de la politique et il n’est plus jamais sorti qu’avec des filles qui faisait 1 m de plus que lui pour les voir arriver avant qu’elle commencent à baisser son pantalon .
@Sax/Cat à Montpellier : donc,oui,encore une preuve du lien entre sexe et politique!
9 De arielle - 05/04/2018, 17:05
Ecroulée de rires !!!!!!
10 De Le prof Turbled - 05/04/2018, 17:55
@arielle :
!!!
Ben dites-donc, c'est un chouette exemple de triple pléonasme! Malgré toutes ces précisions, pas sûr que j'arrive à les distinguer des autres cons, bornés à droite, bornés au centre, bornés to be wild, et même bornés avec une cuillère en argent dans la bouche ou bornés dans la rue.
Il me plaît bien, à moi, que des pèlerins ne changent pas de destination à chaque fois qu'une paille en croix barre le chemin. Voyez Louis XVI. Ne pas lui couper la tête eut été humain. Mais pour valider la révolution, sans doute fallait-il le faire. Mélenchon, c'est Robespierre: pas de compromission avec l'ennemi, sans quoi l'électorat de la gauche dure va mettre les voiles.
Le pov' Maurice fait les frais de ce prosélytisme de façade destiné à la foule avide de revanche.
11 De arielle - 05/04/2018, 18:12
@Le prof Turbled : Rires. C'est mon jour de rires, j'adore. Juste une précision, je ne désignais en rien JLM qui n'est pas con , lui c'est plus grave comme vous dîtes. J'ai juste fait partie d'une liste d'union de la gauche composée de 29 personnes où j'ai croisé quelques cons lambdas :-)
12 De Tournesol - 05/04/2018, 19:07
Méfi.Dans la numérotation grecque,lambda vaut trente,moins que mu,qui vaut quarante,mais plus que kappa qui vaut vingt.Un con lambda a donc déjà une certaine importance.Un se note alpha mais en grec,unique se dit : idiotès. que penser d’un con idiot?a t’il plus de pouvoir de nuisance qu’un con mu ou lambda?
13 De MITO-MITO - 05/04/2018, 19:09
Il faut dire qu'il y avait de quoi s'offusquer pour les fans de Mélenchon, du moins si l'on en croit wikipedia, je cite :
14 De Maurice La grammaire - 05/04/2018, 22:17
Un autre Michel périgordin célèbre, Michel de Montaigne, aurait dit :
Il est bon de le rappeler de temps en temps.
15 De Le prof Turbled - 06/04/2018, 04:14
@MITO-MITO :
Étonnant, non? Mais Wikipédant ne raconte pas que ça. Il nous dépeint un spécialiste du louvoiement "Chaban-Giscard-Chirac", dans la grande incertitude post-pompidolienne, et pire encore, un cador du RPR proche de Pasqua. Un politicard rompu à toutes les singeries de sa caste, si l'on en croit wiki, bien sûr.
Pas sûr que le gaucho de base soit emballé par le personnage, malgré son "ouverture" et ses articles dans la Pravda.
Pov' Maurice...Il doit être amer, cet apéro.
16 De MITO-MITO - 06/04/2018, 08:15
@Le prof Turbled : Yves Guéna professionnel de la politique et de droite bien à droite, étonnant non ?... Mais que ça vous réveille la nuit pour vérifier l'évidence, ça m'en bouche un coin !
17 De Le prof Turbled - 06/04/2018, 08:44
@MITO-MITO :
Hélas, ce n'est pas là la cause des miennes insomnies. Cependant, il faut bien occuper ces nocturnes parenthèses.
Aussi, vous nous l'aviez présenté comme un homme de dialogue et de tolérance. Fallait bien que je m'informe sur cet oiseau rare.
18 De fifi - 06/04/2018, 08:47
Ben ça alors, ça m'troue l'cul ! ...................................................................................................................................... Et, je reste poli.
19 De MITO-MITO - 06/04/2018, 09:46
@Le prof Turbled : Ainsi, vous considérez qu'avoir gardé des relations d'amitié personnelle avec d'anciens "frères d'armes" passés de la résistance au stalinisme béat suggère .
Pour ma part, je bois le coup sans opinion et ne vois pas d'idéologie dans l'ivresse...
L'après guerre dans nos régions (chez moi et en Périgord) a consacré la solidité des alliances de la résistance entre gaullistes et communistes, même si ça peut paraître bizarre à certains, au-delà des postures politiciennes, surtout face à la trahison des rad.-soc. qui plutôt qu'admettre la nécessité de décoloniser, envoient de jeunes appelés se faire flinguer dans des conflits exotiques pour défendre les intérêts particuliers de quelques richissimes néo-esclavagistes...
20 De Le prof Turbled - 06/04/2018, 13:28
@MITO-MITO :
Hé, je veux bien vous laisser commenter ce que vous pensez que je considère. Libre à vous. Je serai probablement le premier étonné de mes considérations, et par la même occasion, vous m'obligeriez en me disant ce que je considérerai dans huit jours.
Du peu que vous avez cité, j'ai retenu qu'il avait écrit dans l'huma, et partagé cet apéro controversé et médiatisé. Pour un homme de droite, il m'avait semblé que ce pouvait être un signe de tolérance et de dialogue. Les amitiés anciennes de ces gens ne me concernent ni ne me regardent.
21 De maurice melliet - 30/05/2018, 08:13
merci pour la photo = superbe
amitiés maurice
22 De Michel - 30/05/2018, 08:28
@maurice melliet : Merci m'sieur !