Vais-je parvenir un jour à épuiser la réserve de photographies faites lors du salon de la moto de la FFMC de Limoges ? Aujourd'hui, j'exploite le thème des Motobécane et Motoconfort. Au début des (deux) temps, en 1923, est créée la société Motobécane qui commercialisera dès l'année suivante un premier modèle, la MB1, une motocyclette à moteur deux temps de 175cc. Le succès est au rendez-vous et bientôt, en 1926, il est question de sortir un nouveau modèle. Or, on craint que celui-ci ne soit pas au point et vienne assombrir la renommée de la marque. Qu'à cela ne tienne, on lance une nouvelle société, une nouvelle marque, Motoconfort, qui servira à essuyer les plâtres. La 308, un monocylindre deux temps de 308cc est née et sera produite également sous la marque Motobécane à partir de 1928.
La cohabitation entre ces deux marques sœurs qui ne trompent personne persiste jusqu'au dépôt de bilan en 1981. En 1983, ce sera sous la férule du sauveur Yamaha que la marque renaîtra. Je n'ai jamais bien compris s'il y avait ou non des différences entre Motobécane et Motoconfort en terme de niveau de finition ou de qualité. Longtemps, j'ai pensé que la Motobécane était plus luxueuse que la Motoconfort mais ce n'est pas si simple. Si vous voulez mon avis, la co-existence de ces deux marques est une idiotie, d'autant plus que le public n'était pas dupe.
Comme on peut le vérifier sur les photos placées juste au-dessus de ces lignes, il a été une époque où l'on faisait de belles motocyclettes chez Motobécane/Motoconfort. Ce n'est pas qu'elles révolutionnaient quoi que ce soit, les solutions techniques étaient celles communément adoptées dans les années 30, mais elles étaient relativement bien finies et finalement assez jolies.
Après guerre, Motobécane savait encore faire de la moto comme le prouve la photo qui sera insérée après ce paragraphe. Que s'est-il donc passé pour que la marque se perde dans la production de cyclomoteurs assez laids dans les années 60 ? On accusera sans doute la désaffection du Français pour la moto provoquée par l'incitation à acheter de la voiture et par la mise à disposition d'automobiles d'occasion sur le marché. C'est sans doute une piste mais il ne me semble pas que ça puisse être la seule. Après une ambitieuse tentative de bicylindre dans les années 50 avec la L4C, la marque choisit de se concentrer sur du deux roues très utilitaire qui ruinera, à mon avis, l'image de la marque. Dans les années 70 et 80, Motobécane ou Motoconfort sera synonyme de petit vieux en bleu de travail et béret à la Gitane maïs collée à la lèvre. Pas de quoi faire rêver le jeune. Pour moi, l'industrie motocycliste française a été frileuse et radine, ne cherchant plus qu'à faire du chiffre d'affaires en proposant au plus cher le moins possible. Frilosité, radinerie, une bonne dose d'incompétence en prime et voilà une marque qui meurt.
Il y aura bien quelques tentatives pour remettre la marque en piste mais le mal était fait. Les 125cc bicylindres deux temps n'étaient pas mauvaises en soi mais le moins que l'on puisse dire, c'est que, du moins dans un premier temps, elles avaient du mal à soutenir la comparaison avec ce qui était produit ailleurs que dans l'hexagone, sur le plan esthétique si ce n'est technique. Pour autant, ce 125cc a été utilisé en compétition comme le montre ces Motobécane-Deleuze bien préparées et apparemment très puissantes.
Le succès mitigé de la 125 allait pousser Motobécane à se relancer dans l'aventure de la "vraie" moto avec une 350cc deux temps trois cylindres. Ce ne fut pas une réussite commerciale. La toute dernière incursion de Motobécane (devenue MBK) dans le monde de la moto aura lieu avec la fabrication des dernières BFG. Parfois, je me demande si le problème n'a pas été de conserver la marque Motobécane lors du retour au vélomoteur. Pour celles et ceux de ma génération, une moto ne pouvait pas avoir Motobécane comme marque tant celle-ci était rattachée aux cyclos aux couleurs douteuses. Le problème a été semblable pour Peugeot. On réfléchira sur le fait qu'il est plus rapide de discréditer une marque que de la rendre prestigieuse.
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1 De Liaan - 14/04/2016, 09:23
Ah, un sujet sur une de mes marques préférées.
On a déjà tant écrit sur Motobek.
La frilosité venait surtout des commerciaux, ceux qui tenaient les finances. Parce qu'au niveau création, il y a eu de nombreux brevets à l'époque de Jeaulme, l'ingénieur ingénieux. Je n'ai malheureusement pas acquis le bouquin "Souvenirs d'un ingénieur" paru dans les années 1980/1990 et introuvable aujourd'hui.
Vous avez partiellement raison en disant que Motobécane-Motoconfort faisait "bleu de travail et Gitane maïs", mais dans les années 1969/1970, Motobek était encore auréolé des anciennes gloires (Superculasse et autres Z) et n'avait pas une image aussi négative. L'arrivée de la 350 tricylindre 2T a été une grande joie parmi les motocyclistes de l'époque, en 1973, mais beaucoup ont regretté que ce soit un moteur 2 temps. Motobek aurait sorti un 4T que les ventes auraient certainement plus décollé, surtout, rappelons le, qu'il y a eu ce fameux "choc pétrolier", et peu de temps après, une T.V.A. de 33% sur les motocyclettes de plus de 240 cm3, considérant que c'était des produits de luxe. Sans compter le fait que les concessionnaires Motobek devait acheter sur leur propres deniers chaque machine qu'ils devaient vendre, plus le côté "Nous, on fait de la Mobylette, on ne va pas se compliquer avec des motos". Du coup, il n'y eu donc qu'environ 800 machines construites et vendues.
La 125 bicylindre 2T :
Michel, vous continuez cette forme de dénigrement propre au Français ordinaire, en répétant ce que disait la presse déjà aux ordres des publicitaires (et qui dit publicitaires généreux dit le pays du soleil levant, hélas). La comparaison avec les chiottes japs !
Et si on comparait vraiment ce qui est comparable, la 125 Motobek était supérieure aux produits japonais : la 125 est une excellente routière, avec une tenue de route efficace, un moteur plein de couple, et un détail qu'évidemment aucun journaliste de l'époque (et hélas actuel, lorsque vous lisez la (maigre) presse sur les anciennes) : je veux parler des repose-pieds arrières suspendus sur la 125 Motobek ! À l'époque, nous autres jeunes partions avec armes et bagages pour de lointaines destinations, et surtout avec passager ! Et j'ai eu l'occasion de faire le passager à l'arrière d'une 125 Yamata, la grande concurrente de l'époque, eh bien, on est surpris par le fait d'avoir les pieds qui montent et qui descendent en fonction du relief de la route, et je n'aurai pas fait une centaine de kilomètre comme ça.
Je pourrais en causer de cette 125 LT, avec laquelle j'ai effectué tant de kilomètres et de randonnées, seul ou avec passagère, jusqu'à l'étranger, bon pas trop loin, mais Suisse, Allemagne, Luxembourg et Belgique, tout de même.
2 De michel - 14/04/2016, 09:33
@Liaan : Je ne dénigre pas. La 125 était supérieure sur bien des points à la production habituelle et je ne dis pas le contraire. Je parle de l'esthétique de la machine et du fait que cette esthétique joue son rôle dans l'acte d'achat. On ne pourra pas nier que les MZ aient eu des qualités, on ne pourra pas dire qu'elles étaient belles.
Pour la TVA, ça touchait toutes les marques de tous les pays.
Il est possible que pour les années 69 et 70 les Superculasse soient encore connues. Je ne sais pas d'où vous tenez ça.
Pour la 350, je suis d'accord sur le fait que le réseau de concessionnaires étaient plus formé à réparer de la bleue que de la moto sophistiquée. Je dis que là aussi, il aurait été bien vu de soigner le dessin et la finition. La joie dont vous parlez est à contre-balancer par l'échec commercial patent. Un 350 4 temps aurait connu le même sort s'il était sorti avec le même cahier des charges que la 2 temps, à mon avis. Et avec des "si"...
3 De Liaan - 14/04/2016, 09:56
Dans les concentrations des années 1969/1970 et après, nombreuses étaient les machines françaises qu'on appelait pas encore anciennes, et qui étaient affublées de selles bi-place, de clignotants et autres phares supplémentaires pour les rendre plus "in". Beaucoup de motards ne pouvaient s'offrir le luxe d'une machine neuve et ressortait les riblons qui n'étaient que de l'occasion relativement récente (les dernières Peugeot, Terrot ou Motobécane n'avaient qu'une petite dizaine d'années). Dommage qu'à l'époque, les images photographie n'était pas aussi nombreuses qu'actuellement, vous seriez surpris de la richesse d'inventions pour "moderniser" et les marques des motos de l'époque. On peut en deviner sur les rares photos dans les trop rares articles sur les concentrations dans la presse de l'époque.
Pour une Motobécane 4T, elle aurait obtenu plus de succès, car à l'époque, il y avait la rivalité entre les tenants du "quatre temps-moteur noble" et du "cylindre à trous". Une 3 cylindres 2T bouffait tout de même ses 12/15 litres de carburant aux 100 km. Un quatre temps aurait consommé nettement moins. Je connaissais des copains motocyclistes qui n'auraient pas hésité à acheter la Motobek si elle avait été un bicylindre 4T.
Mais comme je le disait, les commerciaux avaient le pouvoir au sein de l'usine, et, par exemple, les prototypes de mono 250/4T n'ont jamais été produits.
De toutes les façon, comme vous dites, avec des "si"...
Dans ces années 1960, le marasme motocycliste était universel, que ce soit en Allemagne, Italie ou autres. Sauf pour les Pays de l'Est où a continué une industrie de machines utilitaires (je pense aux Jawa et autres MZ). Et bien sûr, la Grande Bretagne était l'exception. Curieux pays où la météo n'est souvent pas engageante qui continue à fabriquer, et des motocyclettes, et des automobiles cabriolets.
Même de nos jours.
4 De Liaan - 14/04/2016, 11:46
Après avoir observé les images des 125 de compétition, j'ai eu la curiosité très saine d'aller sur
125 DeleuzeDeux sites très intéressants à parcourir pour nous éclairer.
Merci Michel d'avoir photographié ces 125 et leur carénages bavards.
Deleuze 125
5 De Liaan - 14/04/2016, 11:49
Ah, l'adresse des sites a disparu.
Alors c'est :
125 Deleuze
Racing team Deleuze
6 De michel - 14/04/2016, 12:02
@Liaan : Et cette fois-ci, les liens ne fonctionnent pas. Ceci dit, je donne l'un de vos deux liens dans le texte, hein.
7 De Liaan - 14/04/2016, 13:47
@michel : Bah, on fait ce qu'on pneu...
On tape plus vite qu'on ne réfléchit et voilà le bazar.
Pour rappeler le relatif succès des Motobek (125 et 350) par rapport à la concurrence japono, au niveau accessoires (compteurs dignes d'une machine-outils sur la 125LT et feu arrière (de remorque!) sur la 350, n'oublions pas que les fabricants français avaient pratiquement tous disparu à cette époque de marasme pour la motocyclette, chez Motobek, on allait pas non plus TOUT fabriquer, à cause du prix de revient final des vélomoteurs et motos... (Si je me souviens bien, les compteurs des Laverda venaient de chez Gronda, ou un truc comme ça, non ?) Et ça, ça joue chez le consommateur, l'aspect esthétique de l'engin.
8 De jojo - 14/04/2016, 14:16
J'en garde un bon souvenir de ma LT3 (tenue de route, confort et... premiers émois...), Elle n'avait pas le miaulement d'une 125 Suz Gt , peut-être un peu moins puissante qu'une 125 RDX mais sans maîtrise, la puissance n'est rien (hihihi). Le seul truc galère, c'était le changement de cable d'embrayage (il fallait tomber le carter, et sur le bord de la route, c'est pas top...) ; snif motobec...tu es devenu Même Boutique K'yamaha...
ps : Pas retrouvé le poster de thierry Espié (mon idole de l'époque) qui ornait ma chambre à coté de celui des Rubett's (il est peut-être chez moman avec la doc du bps Yak et autre Pernod ?)
9 De shanti - 14/04/2016, 22:54
Quelle jolie photo !
Cette Motoconfort jaune canari est sans aucun doute à côté de ses pompes, mais moi, elle me replace dans les miennes.
Elle offre (la photo) une belle harmonie de couleurs, un côté feng shui très reposant. Ouf ! J'en avais bien besoin.
Le gros plan qui suit est également très attrayant.
Merci pour ces belles photos.
10 De Liaan - 15/04/2016, 05:51
@jojo : Ce qui était marrant, à l'époque, c'était la taille relativement petite des 125 cm3. Elle ne voulaient pas péter plus haut que leur cul, on était dans le raisonnable, c'était des vélomoteurs, pas des motocyclettes. Il n'y avait que la 125TS MZ, la 125 Gilera qui faisaient "moto".
À l'époque actuelle, n'importe quelle 125, et même les 50, ont la taille d'une petite moto, quand aux 500/600, on peut les prendre facilement pour des 1000. Tout a grossi, même les bagnoles. D'aucuns s'en plaignent, comme les motocyclistes qui peinent parfois à remonter certaines files en ville (je sais, c'est interdit), et ces motocyclistes regrettent le temps des "grosses" voitures qu'étaient les Renault 16 et autres 504 qui font désormais figure de "compact" avec cette tendance au "SUV" chère à J-M Lenormand, journaliste au quotidien Le Monde. Ces gros véhicules risquent de disparaître comme ont disparu les "flipper" dans les bistrots, après l'inflation des scores nécessaires à l'obtention d'une partie gratuite...
11 De michel - 15/04/2016, 08:30
@shanti : Merci.
12 De fifi - 15/04/2016, 22:53
Alors, quand je vous dis que c'était mieux avant.
13 De Liaan - 18/04/2016, 09:00
@Liaan : Erratum.
Commentaire n°10, je voulais bien sûr parler de J.M Normand, journaliste au quotidien Le Monde (et non de J.M. Lenormand).
Nos lecteurs auront rectifié d'eux-même.